Le développement du télétravail est-il une fausse bonne idée ?

LE TÉLÉTRAVAIL AVANT L’ÉPOQUE CORONAVIRUS

Le télétravail est un phénomène qui a commencé à se développer bien avant la Covid-19, la flexibilité dans l’organisation du travail était déjà une tendance de fond, qui s’est accélérée depuis ces dernières semaines.

La vie professionnelle change, de nouveaux métiers apparaissent, les modes de travail évoluent et rendent ainsi la relation au cadre de travail traditionnel en entreprise partiellement obsolète.

Il est clair, qu’à l’époque, les employeurs ne voyaient pas d’un très bon oeil ce qu’ils percevaient comme la désertion de leur lieu de travail, un manque de contrôle sur la durée du travail des salariés, ainsi qu’un changement de donne hiérarchique.

Ne plus évoluer ne serait-ce que partiellement dans les espaces de travail de l’entreprise, était synonyme de déséquilibre du contrat de travail, de questions autour de la motivation et du management des salariés. Et puis le domicile du salarié rimait avec sphère privée et plus loin que cela, isolement, ce qui casse les mécaniques de contrôle traditionnelles (Rythme hebdomadaire, organisation verticale du travail etc.)

L’EXPLOSION DU TÉLÉTRAVAIL PENDANT LA COVID-19

Le Coronavirus a complètement changé cette donne.L’organisation du temps est dévolue aux salariés, les managers n’y voient - à priori - plus de souci.

Les nouveaux modes de travail font que l’espace professionnel classique devient facultatif quasiment d’un jour à l’autre. La productivité semble faire un bond en avant et la gestion du temps de travail et du temps de repos relèvent de la simple responsabilité des télétravailleurs.

Chaque collaborateur définit la forme d organisation et la mise en place du travail selon les modalités qui lui conviennent le mieux. Sans compter la préservation sanitaire liée au confinement et au déconfinement.

Alors tout est-il pour le mieux dans le meilleur des monde ?

À court-terme, l’autonomie, la liberté et la productivité sont là, c’est exact. Mais à moyen-terme ?

QU’ATTENDRE DU TÉLÉTRAVAIL DANS LES MOIS À VENIR ?

Pendant que tout le monde se félicite de cette nouvelle donne, il y a toutefois deux aspects majeurs qui sont - pour le moment - occultés.

D’une part, le télétravail s’inscrit dans un mouvement financier antérieur qui vise pour les entreprises à se défaire de leurs charges fixes (les loyers par exemple) et opter pour des charges variables comme le coworking.

D’autre part, certain.e.s d’entre nous sont déjà passé par là il y a … une quinzaine d’années.

En effet, comme gère-t-on sa vie privée quand le travail est à la maison ?

Comment gère-t-on l’intimité parfois liée à son activité professionnelle s’il y a du monde à la maison ?

Comment établir des limites claires à son temps de travail ?

Comment ne pas déborder ou procrastiner, car « après tout je suis seul.e chez moi » quand on n’a pas une organisation stricte de ses heures de travail. Le rythme hebdomadaire s’efface progressivement, on oublie la durée légale du travail, et le travail à distance peut devenir un fardeau.

Notre conviction est qu’il y a là des risques psychosociaux majeurs

COMMENT SAIT-ON TOUT CELA ?

Au début des années 2000, les premiers travailleurs indépendants ou freelances travaillaient déjà de chez eux. À cette époque on ne parlait pas d’internet haut débit, de fibre ou de cloud. Ceux qui maitrisaient Flash, le PhP et le HTML étaient les reines et les rois du Game ;-).

Dans la deuxième partie des années 90, travailler depuis chez soi était un luxe. On ne comptait pas ses heures de travail, il n’y avait pas d’horaire, on avait l’impression que le travail à distance permettait tout. La mission était l’essentiel, la vie privée et la déconnexion (à tous les sens du terme) passait ensuite.

Au bout de quelques mois, un ou deux ans peut-être, plusieurs phénomènes apparurent :

L’émergence de nouvelles technologies qui rendaient les connaissances de ces freelances télétravaileurs obsolètes

Un sentiment de solitude (les fameux risques psychosociaux tels qu’on les appelle maintenant) qui s’est emparé quasi-systématiquement des indépendants

La rupture de la frontière avec la vie privée liée à cette nouvelle forme d’organisation du travail

Puis, progressivement, mission après mission, l’émergence de la concurrence aidant, les clients devenaient plus rares et exigeants. Cela a rapidement soulevé le besoin de développement commercial et donc de se créer un réseau professionnel. C’est là que l’on parle de communauté.

Enfin, le travail à distance provoquait à différents niveaux selon chaque personnalité, une forme de distance sociale, difficile à gérer pour certain.e.s

L’ÉVOLUTION DU TÉLÉTRAVAIL

Très logiquement et très simplement, les freelances et les indépendants sont arrivés à la conclusion, qu’il devaient se regrouper pour retrouver tout ce qui leur manquait désormais.

Ces « nomades » ont décidé de miser sur le travail collaboratif et se sont réunis dans des espaces pour être ensemble. C’était au début des années et on ne parlait pas encore de coworking, encore moins de tiers lieux. Juste d’une approche collaborative salutaire.

Il s’agissait de hangars, ou de locaux associatifs comme le spiral muse à San Francisco, une association LGBT. L’environnement de travail était rudimentaire mais les occupants étaient ravi. On peut le considérer comme le premier espaces de coworking.

Petit à petit, les indépendants ont été rejoints par des entrepreneurs, des startups, des artistes. C’est là, au moment où le mélange entre l’entrepreneuriat, les travailleurs indépendants et les artistes ont commencé à valoriser la créativité, que l’on a parlé de communauté, mais toujours pas de coworking.

Les résultats ont étés au rendez-vous; ces nouveaux espaces où l’on travaillait autrement, sont devenus des écosystèmes vertueux dans lesquels se sont créés du transfert de bonnes pratiques, de savoir, d’opportunités et surtout un vrai plaisir d’être ensemble et de partager.

Le concept d’espace de travail collaboratif ou d’espace de coworking est arrivé plus tard vers 2006, la notion de poste de travail, d’open space ou de flex office était carrément inexistant. À ce moment, il ne s’agissait que de valoriser une nouvelle façon de travailler.

CONCLUSION

Paradoxalement, les télétravailleurs d’aujourd’hui se retrouvent dans la situation des freelances indépendants de la fin des années 90, il y a donc environ 20 ans !

Ainsi, nous sommes convaincus qu’ils vont suivre le même parcours - à la différence que ces derniers sont salariés et non indépendants - mais que la sensation d’aliénation, l’isolation sociale et les premiers burnouts arriveront malheureusement dans les prochaines semaines ou les prochains mois et qu’ils se dirigeront vers des environnements bienveillants, collaboratifs et épanouissants humainement et professionnellement où primeront la qualité de vie au travail, la mutualisation et la volonté de travailler ensemble. Des espaces de co working certes, mais dans leur définition initiale, avec en plus, deux composantes majeures; la proximité du bureau, et la rigueur sanitaire.

Les salariés télétravailleurs deviendront-ils des travailleurs nomades comme les autres ?

Comme le dit le sociologue Michel Maffesoli : « Le prophète est celui qui se souvient de l’avenir ».

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